Bédié à la remise du prix Félix Houphouët BoignyINVESTIGATION 

Rencontre avec le président Bédié: « Je ne suis pas content car je ne suis pas encore arrivé… »

Comme si c’était dans un rêve, le président Bédié était triste et nous nous sommes rencontrés dans le couloir d’une rue débouchant sur un ravin. Nous étions les deux seuls noirs ce matin et cela nous recommande de fraterniser. Les bras derrière son dos, un chapeau sur la tête, il marchait comme s’il réfléchissait à quelque chose d’énorme, comme genre, les écrivains pour s’oxygéner. Que faisais-je dans cette ruelle?

Je ne sais pas trop vous dire, mais devant nous, il y a un grand village bondé de monde. Quelques habitants de ce village, surtout les femmes, toutes de blancs vêtues, les cheveux bien dressés longs comme des fées, en colonne, venaient vers nous et ce sont celles-là que le président Bédié ne voulait pas voir il m’a semblé. Il voulait les éviter quand nos chemins se sont croisés. J’éprouvais un honneur de le croiser, mais lui, me donnait l’impression qu’il avait un message à livrer avant de se rendre dans ce village où il n’y a que les femmes noires aux longs cheveux. 

Quand je les regardais et que je jetais un coup d’œil vers lui, il me semblait regretter sa biche royale puisque ces femmes étaient plus grandes que lui en taille, alors que sa biche royale arrivait juste à son épaule.

Heureux, je l’approche pour le saluer et il met un peu de temps pour me répondre après m’avoir fixé longuement. Je reprends ma salutation avec insistance et il demande mon nom et dès que je lui ai dit que je m’appelais Joël ETTIEN, il retire son chapeau et m’offre le plus beau sourire. ETTIEN, que fais-tu ici à pareil moment, me demande-t-il. Je lui réponds que je suis de passage mais sans me baser éternellement dans ce village. Une discussion s’engage alors entre nous deux.

Bédié: depuis quand, tu es là?

ETTIEN: à peine monsieur le président

Bédié: ah, toi au moins tu reconnais que j’ai été ton président 

ETTIEN : pourquoi dites-vous cela monsieur le président?

Bédié : je suis déçu de bien de personnes majoritairement nombreuses, surtout, les gens de mon cabinet qui me choquent quand je vois tout ce qui se passe derrière moi. Pourtant, si je suis encore là, c’est parce que je ne suis pas encore inhumé pour arriver à ma destination. Tu vois ce temps, j’y suis.

ETTIEN : et pourquoi vous n’allez pas chercher un abri pour vous loger?

Bédié: je ne peux pas tant que je ne sais pas quand est-ce que je serai logé de l’autre côté.

ETTIEN : vous semblez triste monsieur le président

Bédié : il me dit chut, parce qu’une colonie de femmes s’approchait vers nous. Elles passent sans dire mot avec leurs formes élégantes et une belle dentition. Dès qu’elles nous dépassent, il me dit, tu vois ces femmes, ce sont elles qui viennent chercher les nouvelles venues comme nous, mais je ne sais pas pourquoi Alassane Ouattara n’ordonne pas à ma famille de me libérer de la glace. Quand je lui parle, il ne m’entend plus mon jeune frère. ETTIEN, je n’aime pas la glace, mais on m’y contraint. Je ne comprends pas Henriette qui se laisse manipuler alors que je n’aime pas la glace. C’est pourquoi de l’autre côté, si tu te souviens, je n’aillais jamais de manière délibérée, à Paris en hiver et je souffre.

Notre conversation prend fin, mais on se regarde, il est l’heure que je le quitte, mais il ne me regarde plus des yeux. Monsieur le président, je voudrais vous dire au revoir, je m’en vais, le car arrive. ETTIEN , je ne suis pas content de ce qui se passe derrière moi, il y a trop de bruit, de cacophonie qui donne l’impression que je n’ai rien fait et le président Houphouët Boigny m’attend, je ne saurai quoi lui dire.

S’il te plaît, pourrais-tu accepter de transmettre ces messages à ton retour? Il me supplie et je lui réponds que cela dépend de qui il va recommander. Il marque une pause et me fixe pendant que le car approche. ETTIEN me dit-il, vas dire à Alassane Ouattara de m’enlever de cette glace pour que je puisse continuer mon voyage. Pendant qu’on était en train de se dire au revoir, le car qui arrive, n’est pas celui que je dois prendre et on voit le général Ouassenan qui en descend et il crie, président???

Une autre conversation s’engage entre les deux.

Bédié : Ouassenan?

Ouassenan: Oui président 

Bédié: tu fais quoi là toi?

Ouassenan: juste après toi, je me suis contraint de te rejoindre

Bédié: de ton plein gré ou comme ils m’ont poussé?

Ouassenan: je suis heureux de vous revoir, mon cher Henri.

Le chauffeur klaxonne et demande au général de regarder sur son billet et il se rend compte que là où était le président Bédié, n’était pas sa destination et que son voyage se poursuit et il monte dans le car, grand de taille, on le voit soulever sa main en guise d’au revoir.

Je dirige mon regard vers le président Bédié qui semble vouloir me laisser beaucoup de messages. ETTIEN, il me prend par la main et nous esquissons quelques pas, et on s’arrête. Pourquoi les Guikahué et les autres à qui, je n’ais pas eu le temps de leur laisser un héritier font ça devant le monde entier? Il me pose la question. Ils se livrent en spectacle et on dirait que le président Houphouët Boigny est informé, puisqu’on vient de m’apprendre qu’il est le chef du village qui doit logiquement me recevoir, poursuit-il? 

Monsieur le président Bédié, je ne saurais vous répondre, mais ce n’est pas non plus si évident que le message que vous me laissez, pourra être transmis, parce que de tous ceux que vous me citez, personne n’aura le temps de me recevoir car quand tu étais là-bas, c’était pareil.

ETTIEN, je te demande de tout faire pour dire à Henriette que je l’aime toujours, elle est souvent triste comme si je l’avais livrée à la pâture et si elle n’arrête pas que je suis logé, elle pourra me rejoindre, je ne veux pas la voir triste, comme si je l’avais trahie. Je lui ai fait la ferme promesse que je ne pourrai pas les approcher individuellement, mais je saurai comment faire passer le message.

Je sens les pieds de quelqu’un qui me cogne et je me lève, c’est Yohou, bon sang, j’étais en train de rêver et ma femme Yohou me réveille. Quant au président Bédié,il a beaucoup à dire en me laissant ces messages inachevés.

Chers parents du PDCI RDA, le président Bédié me charge de vous dire que tout ce que vous faites en ce moment pèse lourd sur sa destination finale. Il ne peut pas arriver car il n’a rien sur lui pour continuer son voyage. Il est abandonné dans un casier glacial et votre combat lui pèse énormément.

Quant au président Ouattara, les morts ne sont pas morts. Le président Bédié son aîné lui demande de le libérer de la glace afin qu’il puisse continuer son chemin éternel. Il n’a aucun habit sur lui et quand il voit les gens venir à lui, il se cache. Pour un dignitaire comme lui, il faut faire vite pour l’inhumer afin qu’il ait des habits pour arriver à destination.

Si ce n’était pas un rêve, j’allais me retourner terminer notre conversation, mais hélas, c’est qu’un rêve. Mais mon rêve ne me trompe pas.

Quant à sa femme, sa biche royale, il ne supporte pas de la voir trop triste auquel cas, il viendra la chercher ou il laissera des consignes une fois qu’il sera hébergé, alors qu’elle soit comme elle était. Il semblait me dire beaucoup de choses si le général Ouassenan était descendu à notre niveau, mais il m’a semblé que les deux n’avaient pas la même destination. Je l’ai vu s’éloigner de plus en plus loin de lui et ils vivent dans un monde où tout est parfait, quand j’ai vu ces femmes noires déambuler leurs bustes dans leur élégance féminine, dans les rues, loin et sur une colline.

Le président Bédié n’est pas parti et toutes ces cacophonies le perturbent et empêchent ceux qui doivent le recevoir de l’accueillir, mais tel que c’est parti au PDCI RDA, ils n’en ont rien à foutre, tout ce qui compte à leurs yeux, c’est qui, pour prendre sa place et ce tiraillement retarde sa destination.

Ce n’est qu’un rêve.

                                Joël ETTIEN 

           Directeur de publication: businessactuality.com

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